Ligue 1 à 18 clubs : quand l'économie prend le pas sur le sportif
- LA FINE EQUIPE
- 11 nov. 2020
- 3 min de lecture
Vincent Labrune, le président de la LFP, a émis l’idée d’une réduction de l’élite à 18 équipes. Si l’idée d’améliorer la compétitivité des clubs français semble bonne, les réelles intentions derrière ce projet restent floues. Décryptage.
Depuis vingt ans, chaque tempête vécue par le football français, a remis sur le tapis un resserrement de l’élite, avec 18 clubs au lieu de 20 en Ligue 1. Dans un entretien publié dimanche par le JDD, Vincent Labrune, le président de la Ligue, s’est annoncé prêt à “ouvrir un débat sur le nombre de clubs participant à la Ligue 1 et à la Ligue 2”. Comprenez moins d’équipes dans nos championnats professionnels.
Economie 1, Sport 0
La principale justification avancée pour cette réforme est la recherche d’une amélioration de la “compétitivité” des clubs tricolores. Si on pourrait entendre ce terme au sens sportif (resserrer l’élite pour en réhausser le niveau), il résonne surtout au sens économique.
En effet, les motivations premières sont beaucoup plus simples. Et vont essentiellement dans le sens des gros clubs. La logique est élémentaire : en réduisant le nombre de parts, on donne plus de gâteau à chacun. Le leitmotiv de ce rétrécissement est aussi de “rassurer les investisseurs”, qui hésitent en raison du risque sportif et en particulier celui d’une relégation. Drôle de contradiction entre la logique économique et la logique sportive, qui a conduit à une constante réduction de l’incertitude des résultats.
Envoie 18 à la LFP pour trouver que des clubs chauds dans ta région
Sur le plan sportif, au-delà des meilleures conditions de récupération et de préparation, une Ligue 1 à 18 présente certains avantages : une augmentation du niveau moyen, un ventre mou amoindri, plus d’adversité pour les meilleurs équipes et donc une meilleure préparation pour les coupes européennes.
Mais ce passage de 20 équipes à 18 devrait s’accompagner d’une hausse du nombre d’accessions/relégations. Cela permettrait de créer une dynamique entre les deux niveaux du championnat, favoriserait les projets sportifs ambitieux, et éviterait qu’une descente en Ligue 2 soit perçue comme un désastre. Or, l’instauration de barrages pour monter d’une division permet plutôt de sécuriser les maintiens dans l’élite.
Faire le tri pour la sélection
En réalité, c’est plutôt le timing qui semble inopportun. L’urgence n’est sûrement pas là lorsque votre principal diffuseur est en incapacité de payer ses échéances et plonge le monde du football français dans une crise sans précédent. En plus de cela, semble se profiler la “création d’une filiale commerciale” sur le modèle de la Premier League qui donnerait encore plus de pouvoir aux grosses écuries.
Si les dirigeants de clubs sont restés modérés ou silencieux à propos d’un éventuel retour à 18 clubs en L1, il y en a un qui n’a pas caché son enthousiasme. Le sélectionneur des Bleus Didier Deschamps s’est exprimé favorablement sur un rétrécissement de l’élite. “Je fais partie de ceux qui pensent que plus l’élite est resserrée, mieux c’est. Ce serait tirer le foot français vers le haut. Avoir quatre matchs de championnat en moins, en passant à 18 clubs, ça va dans le sens de l’élite” a-t-il indiqué en conférence de presse. Dans le sens de l’élite mais aussi et surtout dans son sens. Si DD n’a aucun problème à afficher son engouement à l’idée d’un passage à 18 clubs, c’est qu’il en connaît les bénéfices pour le football de sélections. Entre 1997 et 2002, la Division 1 avait déjà connu un tel rabotage en accueillant 18 clubs, entraînant la période la plus faste de l’histoire de l'Équipe de France avec le doublé Coupe du Monde 1998 - Euro 2000.
La Ligue 1 à 18 équipes est loin d’être une mauvaise idée. Seulement, le contexte n’y semble pas propice. Aussi, on est en droit de se demander si un pareil projet n’a pas plus de risque de servir des intérêts particuliers au détriment de l’intérêt collectif ?
Comentários