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Le Top 7 2020 : #6 Tadej Pogacar, “Je suis juste un gamin de Slovénie qui a gagné le Tour de France.

Dernière mise à jour : 27 déc. 2020


Tadej Pogacar, le plus jeune vainqueur du Tour/Flickr

Même avec 5 mois d’arrêt dans une période morose, le cyclisme a vécu deux événements grandissimes en son année 2020 : l’envol d’un frenchy vers un maillot arc-en-ciel, et la performance historique sur le Tour de France d’un très jeune déjà très grand. Nous décrypterons plus tard la course pour le maillot de champion du monde. Pour le moment, concentrons-nous sur Tadej Pogacar et son œuvre de septembre.


21 ans et déjà l’une des meilleures performances de l’histoire de son sport, voilà de quoi entrer dans le classement des plus grands moments sportifs de l’année. Si cette édition de La Grande Boucle, sous surveillance sanitaire, pouvait passer inaperçue après son dénouement, Tadej Pogacar s’est chargé de la rendre historique à sa manière par ses performances. Le 15 avril 2020, le Tour de France initialement prévu du 27 juin au 19 juillet, est reporté au 29 août jusqu’au 20 septembre. La crise sanitaire mondiale n’épargne pas les autres “grandes” compétitions cyclistes qui sont annulées dans la foulée. L’idée d’un Tour à huis-clos a longtemps été considérée, mais finalement, les spectateurs ont tout de même eu le droit de se répandre le long de routes qui sillonnent le pays pendant trois semaines. De plus, les négociations complexes pour les reports du Giro et de la Vuelta ont permis au Tour de France de se placer comme le premier “grand tour” dans le calendrier, tandis que les autres commencèrent à partir d’octobre. De ce fait, les “tops” coureurs en manque d’adrénaline après 5 mois d’arrêt, se sont positionnés sur le Tour, rendant un plateau de talent XXL : Roglic ; Pogacar ; Lopez ; Pinot ; Dumoulin ou encore Richie Porte et bien d’autres leaders étaient présents pour en découdre jusqu’à Paris pour le maillot jaune.


Un Slovène peut en cacher un autre


Le Tour de France 2020 est lancé le 29 août dernier dans l’excitation générale, mais aussi dans l’appréhension de le voir être arrêté dès les premiers jours, si le virus se transmet aussi vite chez les coureurs, que les seringues chez Festina auparavant. Néanmoins, le virus ne touchera “par miracle”, que les membres des staffs des équipes en courses (bizarre…). La Grande boucle n’aura donc pas eu besoin d’une deuxième modification de ses dates. Il faut bien avouer que ce Tour démarre en grande pompe, Julian Alaphilippe remporte la deuxième étape et s’adjuge le maillot jaune par la même occasion. Nans Peters ajoute une nouvelle victoire française lors de l’arrivée à Loudenvielle, tout va pour le mieux. Cependant, lors de la 9ème étape entre Pau et Laruns, le Tour prend un premier tournant. Les premiers légers écarts de temps sont créés suite à la première victoire d’étape au sprint de Tadej Pogacar. Le coureur de 21 ans s’est extirpé du groupe des leaders en compagnie de 4 autres concurrents, dont son compatriote, mais adversaire, Primoz Roglic. Les deux natifs de “La Petite Europe” terminent 1er et 2ème à l’issue de cette étape, mais ce n’est pas le Slovène, vainqueur ce jour-là, qui reprend le maillot jaune jusque-là porté par Adam Yates. En effet, Primoz Roglic, grand favori et déjà vainqueur de la 4ème étape, a plusieurs dizaines de secondes d'avance sur ses concurrents, notamment grâce à coup de bordure somptueusement maîtrisée par son équipe Jumbo-Visma. A partir de cette 9ème étape, le Tour de France devient une répétition de ce dont on avait la chance d’observer ces dernières années avec nos amis de Sky-Ineos : un concentré d’ennui grâce à la super-team du leader qui aseptise la course, empêchant toutes attaques, imposant une allure trop élevé pour les différents favoris qui ne possèdent pas des équipiers tels que Tom Dumoulin, Sepp Kuss, ou le grand escaladeur de montagne Wout van Aert. Malgré ce marasme de compétition, un homme résiste tant bien que mal aux Jumbo-Visma au fil des jours, ne perdant pas trop de temps en étant le seul à l’attaque sur de nombreuses étapes. Evidemment, cet homme, c’est Tadej Pogacar, et il ne va pas simplement se contenter longtemps de résister à Primoz Roglic.



Pour Pogacar, les étapes, mais ni le général, ni le temps


La veille de la 15ème étape, Primoz Roglic poursuit sans trop de crainte sa promenade qui s’appelle être “premier au général du Tour de France”. Chaque jour, il inflige de nouvelles lourdes secondes à ses adversaires, sauf à Tadej Pogacar qui se maintient à 44 secondes de lui depuis plusieurs étapes maintenant. Lors de l’arrivée au Grand Colombier, Primoz Roglic assomme un peu plus son compatriote et dauphin. Après 164 km, l’étape est tout ce qu’il y a de plus classique, voyant les Jumbo contrôler jusqu’à ce qu’un kamikaze tente de dynamiter la course en s’échappant du groupe des favoris dans la montée finale, se faisant rattraper 500 mètres plus loin par le peloton, et 30 secondes après par les attardés. Tadej Pogacar impose une attaque bien plus intense que celles des autres leaders. Seul Roglic peut le suivre et se ventouser à son pneu comme à celui de Sepp Kuss lors d’une étape de plat. Les deux Slovènes arrivent au sommet du col à deux. Pogacar, maillot blanc sur ses épaules, remporte sa deuxième étape au sprint devant Roglic, mais malheureusement pour lui, il n’arrive toujours pas à le distancer sur le chronomètre. Seulement 4 petites secondes sont gagnées par le meilleur jeune. Le plan de Roglic marche à merveille. Il minimise les dégâts alors qu’il ne reste plus que 5 jours pour lui prendre son maillot. Les jours suivants, Pogacar enfile sur ses épaules un deuxième maillot : celui du meilleur grimpeur. Mais aussi, Roglic reprend 17 secondes sur Pogacar lors de la 17ème étape. Il ne reste plus que l’avant-dernière étape pour que le double porteur de maillot puisse enfiler la tunique jaune, un contre-la-montre. Cela tombe bien, Tadej Pogacar est un spécialiste de la discipline. Aussi, cela tombe mal, Primoz Roglic est un spécialiste encore plus expérimenté de l’effort solitaire.



La performance d’une vie sur 36 km


Lure - La Planche des Belles Filles, 36.2 km, 57 secondes d'écart, voilà le dernier obstacle des deux coureurs slovènes dans leur quête de gloire. Pogacar s’élance avec son maillot de champion de Slovénie du contre-la-montre. Deux minutes plus tard, c’est le maillot jaune qui descend la rampe, pédalant d’ores et déjà vers la plus haute marche du podium à Paris. Mais les choses ne se déroulent pas comme prévues pour le leader au classement général. Tadej Pogacar lui reprend 13 secondes au 1er temps intermédiaire. Jusque-là rien d’anormal, le maillot jaune augmente son allure, son dauphin étant certainemet parti trop vite, quitte à se cramer dans la monstrueuse Planche des Belles Filles. Cependant, au 2ème temps intermédiaire, Tadej Pogacar reprend encore 36 secondes au leader des Jumbo-Visma. La surprise et la panique se lisent sur le visage de Primoz Roglic à l’annonce de son manager dans l’oreillette. De son côté, Pogacar ne cesse d'accélérer, la tête dans le guidon sans se retourner. Il est comme sur un nuage duquel personne ne pourrait l’atteindre. 3ème intermédiaire, 1 minute et 22 secondes de retard pour Roglic. L’histoire est en marche. Pogacar est virtuel maillot jaune. Dans les 3 derniers km, Roglic s’écrase, Pogacar s’envole. Il remporte finalement sa troisième étape avec ce contre-la-montre, mais aussi évidemment le maillot jaune d’un Primoz Roglic désemparé sur la ligne d’arrivée. Le leader du tour pendant 11 jours possède 59 secondes de retard sur Pogacar, alors qu’il en avait 57 d’avance une heure auparavant. L’exploit est historique, inimaginable.



Tadej Pogacar devient le premier vainqueur slovène et le plus jeune vainqueur du Tour de France le lendemain sur les Champs. Ce n’est qu’anecdotique à côté de son immense parcours sur ses 21 jours, mais il rapporte également dans sa valise le maillot à pois et le maillot blanc. La 107ème édition de La Grande Boucle peut se résumer à la simple participation de Tadej Pogacar. 21 ans, déjà au sommet, l’un des plus grands moments de l’histoire du cyclisme, son contre-la-montre, l’un des beaux moments de sport cette année.


Marco Gasparini

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